Circuit du médicament - La recherche clinique

LE passage à l'humain

Les essais cliniques regroupent un ensemble d’études du candidat-médicament chez l’Homme. Ils sont organisés en quatre phases successives (phase 1, phase 2, phase 3, phase 4). L’essai est susceptible d’être arrêté à n’importe quelle étape si le traitement ne répond pas aux critères d’évaluation fixés (aussi appelés critères de jugement ou endpoints).

Ils permettent de répondre à une question scientifique : quelles sont l’efficacité et l’innocuité d’un médicament (ou d’un cocktail de molécules ou d’une forme d’administration…) dans une population d’étude définie (âge, genre, sexe, symptômes…) ?

Différents rôles

Le promoteur (aussi appelé sponsor) assume la responsabilité (recrutement, règlementaire, assurance…) et le financement de l’essai clinique. Il peut-être un laboratoire pharmaceutique, une association, un CHU…

L’investigateur est un professionnel de santé qui dirige scientifiquement l’essai. Lorsque plusieurs investigateurs sont impliqués, l’investigateur principal est appelé coordonnateur.

Les participants sont des patients ou des volontaires sains ayant donné leur consentement.

Promoteur et investigateur peuvent être aidés par de nombreuses structures et dispositifs :

  • CIC (Centre d’Investigation Clinique) et DRCI (Direction de la Recherche Clinique et de l’Innovation) sont les structures intégrées des Hôpitaux et qui coordonnent les essais cliniques.
  • E-CRIN est une organisation européenne de soutien à la recherche clinique multinationale en Europe. F-CRIN est son entité française, dont le réseau OrphanDev dédié aux maladies rares.
  • LEEM (Les Entreprises du Médicament)

Différents types d’essais cliniques

Les essais cliniques ne sont pas utilisés que pour tester de médicaments. Ils peuvent également être conçus pour tester une prévention, un dépistage, un diagnostic, un dispositif d’évaluation ou d’amélioration de la qualité de vie.

Habituellement un essai clinique teste l’efficacité d’une molécule dans une indication (pathologie) donnée. Il peut arriver qu’une molécule soit testée en parallèle dans plusieurs pathologies, on parle alors de ‘basket trial’ (ou essai ‘panier’ ou essai ‘basket’).

Différentes méthodologies d’essais cliniques

Essai clinique randomisé

Les traitements sont attribués aux participants à l’essai clinique par hasard plutôt que par choix. Ni le chercheur ni le participant ne sélectionnent le traitement qu’un participant donné recevra.

Essai clinique contrôlé par placebo

Essai clinique dans lequel le traitement d’intérêt est comparé à un groupe témoin qui reçoit un placebo (un traitement qui ressemble au traitement expérimental mais qui ne contient aucun ingrédient actif).

Essai clinique ouvert

Type d’essai clinique dans lequel les participants et les chercheurs savent quel traitement est administré aux participants.

Essai clinique en simple aveugle

Essai clinique dans lequel l’équipe de recherche de l’essai clinique est au courant du traitement qu’un participant prend mais les participants à l’étude ne savent pas quel médicament ou traitement ils reçoivent.

Essai clinique en double aveugle

Type d’essai clinique dans lequel ni les participants à l’étude ni les chercheurs ne savent quel traitement les participants reçoivent jusqu’à ce que l’étude soit terminée. Le pharmacien sait quel traitement les participants reçoivent. Un tel masquage est conçu pour empêcher les membres de l’équipe de recherche et les participants à l’étude d’influencer les résultats.

Design adaptatif

Rompt avec le côté séquentiel des quatre phases habituelles pour obtenir la même information, plus vite. L’idée est de modifier certains paramètres en cours d’essai pour gagner du temps voire adapter le nombre de patients inclus.

Différents ampleurs d’essais cliniques

Un essai clinique peut impliquer plusieurs centres d’inclusion (étude multicentrique) ou un seul centre (étude monocentrique). Dans le cas des maladies rares, il peut s’avérer compliqué de recruter un nombre suffisant de patients pour les méthodologies communément appliquées. On se tournera donc plutôt vers des méthodologies applicables aux essais cliniques de petits effectifs (N-of-1, statistiques bayésiennes…).

Les critères d’évaluation

Les critères d’évaluation sont aussi appelés critères de jugement (CDJ), endpoints, outcomes… Ce sont les paramètres mesurés que l’on souhaite voir modifiés par le traitement. C’est leur mesure qui démontrera, ou non, l’efficacité du traitement. Le critère de jugement primaire (CJP – primary endpoint) est celui qui aura le plus d’importance (mortalité par exemple), son choix est donc particulièrement important pour pouvoir conclure de l’efficacité ou non d’un essai ; des critères secondaires peuvent être mesurés en parallèle (mobilité, durée d’hospitalisation…).

Les critères sont identifiés à partir des objectifs de l’étude (guérison, prévention, symptomatologie, qualité de vie…), du TPP (Target Product Profile), mais également de l’histoire naturelle de la maladie et du vécu des patients. On cherchera ainsi à mesurer si l’effet observé par l’investigateur est perçu comme une amélioration par le patient en ayant recours aux PCOMs (‘Person Centered Outcome Measure’ – Critère d’évaluation centré sur la personne). Ces mesures sont de plus en plus importantes lors des négociations avec les agences règlementaires pour l’accès au marché. Les PCOMs regroupent, entre autres :

  • Les PROMs (‘Patient-Reported Outcome Measures’ – Critère d’évaluation rapporté par la personne) qui mesurent la perception quant à l’effet du traitement, la relation au traitement.
  • Les PREMs (‘Patient-Reported Experience Measures’ – Critère d’expérience rapporté par la personne) qui mesurent la perception quant à l’administration du traitement, la relation à l’équipe de soin.

Pour aller plus loin : https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0040595722000099

La demande d’autorisation

Tout essai clinique doit faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès des agences nationales (en France l’ANSM, l’Agence nationale de Sécurité du Médicament). Une procédure accélérée a été mise en place à l’ANSM pour rendre son évaluation finale en 40 à 110 jours selon le type d’essai clinique. Un guichet Innovation et Orientation (GIO) a également été mis en place pour aider les porteurs de projet sur les aspects scientifiques, techniques, juridiques et/ou règlementaire. Tout changement ou modification du protocole doit faire l’objet d’un amendement.

Pour aller plus loi : https://ansm.sante.fr/page/essais-cliniques-procedure-fast-track-pour-les-medicaments

La phase 1

Elle correspond à la première administration du produit chez l’Homme. A ce stade, l’objectif de l’étude n’est pas de mettre en évidence ou de mesurer une efficacité thérapeutique mais de collecter des informations sur la tolérance et la sécurité du produit. En théorie, la phase 1 est réalisée chez des volontaires sains. Mais il existe de nombreux cas (maladies graves dont les cancers ainsi que certaines maladies rares) pour lesquels le protocole est modifié. La phase 1 est alors directement menée chez un très petit nombre de personnes malades.

Dans le cas d’un repositionnement, cette phase peut ne pas avoir lieu si la tolérance et la sécurité de la molécule considérée sont déjà connues.

En fin de phase 1, l’investigateur peut être amené à déposer un Plan d’Investigation Pédiatrique (PIP), si le médicament est envisagé pour une indication pédiatrique.

La phase 2

Elle concerne toujours des patients (et non des volontaires sains). Elle permet d’avoir des premières données d’efficacité du candidat-médicament chez l’Homme (données pharmacocinétiques, rapport bénéfice/tolérance) permettant de construire l’essai de phase 3.

La phase 2a permet d’estimer la tolérance de la molécule sur un nombre limité de patients. Dans le cas d’un repositionnement, cette phase peut ne pas avoir lieu si la tolérance et la sécurité de la molécule considérée sont déjà connues.

La phase 2b permet de déterminer la dose thérapeutique sur un plus grand nombre de patients.

La phase 3

Les études de phase 3 sont appelées études pivot. L’objectif est de démontrer la supériorité (ou l’équivalence) de l’efficacité thérapeutique du candidat- médicament en le comparant à un traitement de référence (gold-standard) ou à un placebo.  Elles sont décisives et incontournables pour l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) du médicament. C’est pourquoi elles sont menées selon une méthodologie scientifique rigoureuse qui vise à éviter les biais.

La population d’étude est choisie selon des critères d’inclusion définis par l’équipe de recherche médicale. L’éligibilité de chaque patient est confirmée par des consultations spécifiques et d’éventuels examens complémentaires. Le nombre de patients à inclure est calculé afin que celui-ci permette d’obtenir une puissance statistique suffisante pour analyser et interpréter correctement les données.

La phase 4

Elle est mise en place après la commercialisation du médicament. Il s’agit d’études à grande échelle qui visent à évaluer l’impact de l’utilisation du médicament en vie réelle, pour confirmer son efficacité et recueillir les effets secondaires et interactions médicamenteuses (pharmacovigilance) ou encore d’affiner les indications thérapeutiques.

Temps, coût, taux de succès

Ces différentes étapes peuvent durer 5 à 15 ans et représentent environ 75% du coût global*.

The R&D Cost of a New Medicine, Jorge Mestre- Ferrandiz, Jon Sussex and Adrian Towse, OHE, déc. 2012.

 

Pour aller plus loin : https://www.podcastics.com/podcast/episode/les-essais-cliniques-124785/

https://www.youtube.com/watch?v=L8bsX3uELr4&list=PLDHtkfO_jIXBh8NOWfhivrs4Dj19pnoSo&index=5

 

Par sa proximité avec les patients, l’association joue un rôle d’importance pour diffuser au sein de la communauté le lancement d’un nouvel essai clinique et faciliter le recrutement et l’inclusion des patients éligibles.

Avant même le lancement de l’essai, l’association, par sa connaissance fine de la maladie, des patients et de l’environnement, a toute pertinence à participer à la conception de l’essai clinique. Elle pourra ainsi abonder aux stratégies pour atteindre les patients éligibles, choisir les critères d’inclusion/exclusion, assurer l’adhésion des participants, discuter du choix du critère de jugement principal, évaluer la pertinence des PCOMs utilisés… Il a ainsi été montré une réduction du temps de validation des amendements des essais cliniques lorsque celui-ci a été préparé avec les associations de malades (6 mois versus 2 mois – F. Houyez, Eurordis, Universités d’Automne de l’Alliance maladies rares 2022).

Cette relation avec le sponsor de l’essai peut se faire via l’association, ou par l’intermédiaire d’un CCM (Comités Consultatifs de Malades – aussi appelés CAB pour Community Advisory Board).

Pour aller plus loin : https://www.eurordis.org/fr/comites-consultatifs-de-malades-pour-associer-les-patients-a-la-recherche-clinique/

Les outils pour les adhérents de l’Alliance maladies rares :

Universités d’automne 2020 – Vidéo « Les relations associations de malades – industries pharmaceutiques »

 

Témoignages à venir.

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