Circuit du médicament - La recherche fondamentale

De la découverte de la maladie aux pistes thérapeutiques

Médicament

« Toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou chez l’animal ou pouvant leur être administrée, en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique. » Code de la Santé Publique (article L.5111-1)

Les travaux de recherche fondamentale visent à mieux comprendre les mécanismes des maladies. Ils permettent d’identifier des stratégies pertinentes pour atténuer, idéalement traiter ou mieux encore, prévenir la maladie ou certains de ses aspects.

Les mécanismes à l’origine des maladies sont souvent complexes. Les recherches fondamentales sont donc abondantes. En effet, il est indispensable d’explorer un maximum de pistes pertinentes. Même si elles n’aboutiront pas toutes au développement d’un nouveau médicament à moyen terme !

Les travaux sont menés dans plusieurs pays par différentes équipes de recherche qui communiquent notamment par le biais de publications d’articles scientifiques et de congrès internationaux, mais aussi de consortium nationaux (CRMR, Filières)  ou internationaux (ERN, IRDIRC).

Connaissance de la maladie

« Faire feu de tout bois : il n’y a pas d’autre posture quand les mécanismes en cause sont si hétérogènes. » Pr Stanislas Lyonnet Figaro 11:08/2017

Par des études d’histoire naturelle, des explorations cliniques et biologiques (analyses génétiques), l’observation de modèles animaux, par la comparaison entre non-répondeurs et répondeurs à un traitement (back-translation) … les chercheurs vont mettre en lumière les causes de la maladie et les mécanismes physiologiques altérés. Ces éléments permettront de comprendre les bases moléculaires de la maladie, c’est à dire les éléments sur lesquels agir pour la soigner, mais également des « marqueurs » de la maladie. Ces marqueurs, appelés aussi biomarqueurs, seront exploités pour mieux diagnostiquer la maladie, en prédire l’évolution mais aussi pour démontrer l’efficacité du médicament.

Toute la difficulté à cette étape réside dans l’immense quantité d’informations que nous ne maîtrisons pas encore sur le fonctionnement biologique, que ce soit à l’échelle cellulaire ou de nos organes. Plus de 20 000 gènes dans l’ADN humain codent pour nos protéines, mais le rôle de chacune et leurs interactions ne sont pas toutes caractérisées, loin de là. Et que dire des 100 000 séquences d’ADN ‘non-codantes’ dont on sait désormais qu’ils régulent également les mécanismes cellulaires, sans toujours savoir exactement comment !

Cette hypercomplexité explique pourquoi la recherche fondamentale semble avancer ‘lentement’ : la caractérisation d’une maladie nécessite souvent de comparer ce qui se passe en situation ‘saine’ et en situation ‘malade’. Un peu comme essayer de comprendre pourquoi une mousse au chocolat reste liquide mais sans connaître la recette d’une mousse au chocolat aérienne : le cuisinier devra retrouver tous les ingrédients de la recette, caractériser leurs propriétés, retrouver comment les assembler, dans quel ordre et quelles conditions optimales… avant de pouvoir comprendre pourquoi le dessert dans son assiette n’a pas l’aspect d’une mousse au chocolat !

Identification et validation des cibles ↔ Découverte du produit

De l’œuf et de la poule…

En mettant en lumière les bases moléculaires de la maladie, le chercheur va accéder à des cibles potentielles pour la traiter, c’est à dire des éléments biologiques sur lesquels agir. Mais selon la complexité des mécanismes cellulaires impliquant cette cible, celle-ci pourra, ou non, être pertinente. Il est donc important de la caractériser puis de la valider sur des modèles animaux ou cellulaires. En effet, beaucoup de médicaments échouent dans leur développement, soit parce qu’ils ne sont pas efficaces, soit parce qu’ils sont toxiques, soit parce que la cible n’a pas été bien validée.

Quand peut-on dire qu’une cible est validée ? Elle doit avoir un lien avec la pathologie et sa progression, être exprimée uniquement dans les organes touchés par la maladie (vérifié par transcriptomique et protéomique), et être régulée par le traitement-candidat sans effet toxique sur les autres acteurs de la cellule (vérifié par biomarqueurs pharmacodynamiques).

Une fois la cible validée, un criblage (in silico, in vitro…) permettra de trouver des molécules agissant dessus.

Mais la découverte d’un potentiel médicament peut être réalisée en parallèle ou même avant la caractérisation de la cible. Nombre de criblages moléculaires se réalisent sur des critères cellulaires globaux (survie) sans considération pour une cible donnée. C’est alors la molécule (aussi appelé ‘hit’) qui mènera le chercheur jusqu’à la cible en jeu.

Une fois la cible validée et le composé identifié (aussi appelé ‘candidat-médicament’), le chercheur dispose des premiers éléments d’une preuve de concept.

Choix des indications

La sélection des indications d’intérêt est basée sur l’expression et la modulation de la cible par le traitement. Une fois la cible validée dans une pathologie donnée, le spectre des indications tente alors d’être élargi à d’autres pathologies concernées par cette cible, afin de maximiser l’utilisation du produit développé.

Pour aller plus loin : https://www.podcastics.com/podcast/episode/validation-des-cibles-et-choix-des-indications-116922/

Temps, coût, taux de succès

La recherche fondamentale est financée principalement par des fonds publics ou associatifs. Son coût et sa durée sont presque impossibles à estimer.

Dans le cas de la mise au point d’une molécule chimique, après caractérisation de la pathologie d’intérêt, on estime :

  • La validation de la cible à 1,5 an et 3% des coûts de développement,
  • Le criblage des molécules à 1,5 an et 6% des coûts de développement,
  • L’optimisation d’une dizaine de molécules prometteuses pour la même cible à 1,5 an et 17% des coûts de développement.

A l’issue de ces étapes, soit 4 à 5 ans et 25% du coût de développement, on disposera d’une dizaine de molécules prometteuses mais dont 1% seulement arriveront statistiquement jusqu’à une mise sur le marché. En effet, le taux d’échec (appelé aussi attrition) est très élevé ! Ceci explique qu’après cette phase de recherche fondamentale, le chercheur entre en phase pré-clinique, afin de dé-risquer sa preuve de concept. Le dépôt de brevet se planifie en parallèle.

Inciter au développement de protocoles de recherche

Par sa collaboration avec les filières, centres de référence et laboratoires de recherche, une association peut témoigner des besoins non couverts, inciter à la recherche sur sa pathologie, faire entendre le besoin de thérapie…

Avoir un dialogue constructif et transparent avec les chercheurs publics et privés permet également que soient pris en compte les besoins réels des patients. De plus en plus d’initiatives de recherche associent, sur un pied d’égalité, patients, proches, chercheurs et soignants, afin d’identifier les manques en termes de connaissance de la maladie / de traitement / de prise en charge, de prioriser les questions de recherche à développer, et de faire part des résultats et avancées à toute la communauté pour une meilleure implémentation des solutions mises au point. On parle ainsi de recherche participative, d’engagement des patients en recherche (PPIE : Patient and Public Involvement and Engagement), de recherche centrée patient (PCOR : patient-centered outcomes research)…

Enfin, le soutien financier de travaux de recherche fondamentaux permet de poser les 1ers jalons de la mise au point d’un traitement.

 

Témoignages à venir.

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